La liberté de religion est
un droit fondamental protégé par la Constitution
canadienne. Toute loi, tout règlement municipal ou scolaire
et toute clause contractuelle qui va à l’encontre
de l’exercice de ce droit fondamental est nul à
moins, évidemment, qu’il ne protège un
droit encore plus fondamental. Si, pour de simples raisons
esthétiques, les règlements d’un
condominium interdisent une pratique religieuse, ces
règlements sont nuls. De même, tout
règlement scolaire — même s’il
émane d’une institution non confessionnelle
— est nul s'il va à l’encontre
d’une prescription religieuse. Précisons ici que
même si on a « sorti les crucifix des
écoles », on n’a jamais interdit un
élève de faire un signe de la croix au
début d'un repas, ni de porter un pendentif en forme de
crucifix. La déconfessionnalisation de nos
institutions scolaires ne signifie donc pas l’apostasie des
personnes qui y travaillent ou qui y étudient, ni
même l’interdiction des signes ostentatoires
d’une pratique religieuse (contrairement à ce que
peut interdire une constitution comme celle de la France). Donc, on
peut pratiquer sa religion à l'intérieur d'une
école non confessionnelle. Toutefois, plus cette pratique
est discrète, moins elle risque d'offenser ceux qui pourrait
percevoir tout rituel religieux public comme démonstratif et
insécurisant. Donc sur demande, l'aménagement
temporaire ou permanent de salle(s) de prière dans les
écoles est dans l’intérêt de
tous.
Un problème que l'on peut anticiper
est celui des choix culinaires offerts dans nos cafétérias
scolaires. Précisons ici que cette question ne concerne pas
que le porc (tabou chez les Juifs et les Arabes), mais
également le bœuf (sacré chez les
Indous), les produits laitiers (interdits par la religion Juive), les
poissons (défendus aux Bouddhistes), etc. Si on souhaite
établir un régime compatible avec tous les
interdits religieux, cela est pratiquement impossible. C'est pourquoi
nos cafétérias scolaires devront préparer (ou,
plus commodément, acheter de traiteurs) des plats
spéciaux et s'équiper d'instruments de cuisine
respectant les interdits religieux (par exemple en se dotant de sachets
d'ustensiles jetables). Évidemment cela
représente des coût additionnels, comme le
bilinguisme au Canada coûte davantage que l'unilinguisme,
Selon
le sondage LFOP
(Le Monde / Le Point / Europe 1) réalisé en
France le 5 octobre 2001, 36% des Musulmans se disent croyants et
pratiquants alors que 42% des Musulmans français de disent
croyants mais non pratiquants. Au cours du Ramadan
de cette année-là, 22% n'avaient pas
jeûné. 66% ne prient pas chaque jour. 79%
n'allaient généralement pas à la
mosquée le vendredi et 35% boivent occasionnellement de
l'alcool. À l'exclusion des prières quotidiennes,
le fait de jeûner ou d'aller à la
mosquée n'est pas soumis au bon vouloir
d'infidèles. Par conséquent, tenter
d'empêcher une pratique religieuse constitue de la
persécution religieuse : toutefois on voit donc que tout
mettre en oeuvre pour s'en accommoder favorise son inobservance
à moyen terme chez qui sont astreints à des
pratiques religieuses exigeantes. En somme, s'opposer à
l'Islam la radicalise : s'en accommoder la corrompt.
Dernièrement,
la population québécoise a
été choquée d’apprendre
qu’un centre sportif privé avait
décidé de soustraire des femmes à la
vue de voisins dont la religion prescrit des règles de
modestie stricts à ses fidèles. Dans les faits,
cela revenait à imposer à ces femmes les
règles d’une religion qui n’est pas la
leur. Cet incident a amené beaucoup de
Québécois à s’opposer
à la notion d'accommodement raisonnable et
à extrapoler que les femmes pourraient en venir à
porter la bourca afin d’éviter
d’offenser ceux qui frémissent à la vue
de la peau féminine. Jusqu’ici, les accommodements
raisonnables prescrits par les tribunaux ont consisté
à forcer la création d’exceptions
à des règles qui se voulaient absolues. Jamais
nos tribunaux ont voulu contraindre la majorité à
exercer la religion d’une minorité. Il ne s'agit
donc pas ici d'un accommodement raisonnable. Rappelons qu'un tribunal
ontarien a déjà statué que d'obliger
les femmes à cacher leur poitrine alors que la poitrine
masculine ne souffre pas d'un tel interdit, constitue de la
discrimination sexuelle.
Si nous souhaitons perpétuer pour l'éternité le
Québec comme il était au sortir de la
Révolution tranquille des années '60, alors
fermons nos frontières et repassons en boucle nos vieilles
émissions de télévision. À
tort ou à raison, nous avons décidé
d'accueillir chez nous des personnes qui apportent avec eux des
habitudes culturelles et religieuses différentes des
nôtres. En cela ils nous ressemblent ; que font beaucoup de
ces Québécois qui passent des mois en Floride si
ce n'est s'abonner au câble québécois
afin de continuer à suivre leurs parties de hockey et afin
de ne pas manquer leurs téléromans
préférés.
Si les
immigrants représentent pour nous une source de
problèmes, cessons d'en importer. Toutefois, si nous
manquons de médecins, d'infirmières, de personnel
qualifié dans différents domaines, bref, si nous
croyons que ces invités pourraient enrichir notre
collectivité, faisons un petit effort pour être
aimables et accueillants.
Défendre les
compromis raisonnables ne signifie pas être prêts
à tout pour avoir la paix. Il est clair que l'excision du
clitoris des petites filles, les crimes d'honneur, l'assassinat pour
raison d'apostasie, vitrioler la fiancée qui change
d'idée, épouser une mineure, l'esclavage, tous
permis ou tolérés dans certains pays, doivent
être interdits chez nous. De plus, je crois que les
déguisements complets (la bourca — je ne parle pas
ici du voile islamique qui laisse visibles les traits du visage — de
même que les déguisements d'Halloween, cette
fête vulgaire d’inspiration américaine)
devraient être interdits sur la place publique pour des
raisons de sécurité. Le reste, quelle
importance. Ce que nous appelons ”accomodements raisonnables” n’est qu’une
version actuelle du “vivre et laisser vivre” des hippies des années ’60 ;
une manière de laisser les autres vivre leur différence sans que cela
nous engage à quoi que ce soit.